Inceste. La construction d'un tabou
Sexualité condamnée entre un couple de même parenté sous l'Ancien Régime, l'inceste ne désigne plus, à partir de 1810, que les violences sexuelles commises par un parent sur un enfant. On mesure alors les ravages de ce crime, mais le silence s'installe. Au XIXe siècle, c'est la famille qu'il faut avant tout protéger.
Le 8 floréal de l'an IV (27 avril 1796), le directeur du jury d'accusation de l'arrondissement de Jodoigne en Belgique écrit au ministre de la Justice français. Il est démuni. Dans sa juridiction, à Orbais, un père et sa fille ont eu un enfant ensemble et cette naissance cause grand scandale aux alentours. Il souhaite réprimer sévèrement le couple. Mais comment peut-il les juger alors que le crime d'inceste n'existe plus ? La réponse de la division criminelle lui parvient quelques jours plus tard : « Il ne faut jamais faire avec les lois ce qu'on peut faire avec les moeurs [...]. Il faut laisser à l'opinion publique le soin de punir un crime atroce, sans doute, mais qui ne fait pas partie de notre jurisprudence criminelle ; c'est aux concitoyens des coupables à le venger1. »