La langue comme marqueur
En 1860, pour une majorité de la population, le français n'est pas la langue principale. C'est la IIIe République qui va en faire un moteur d'unité nationale, supplantant tous les critères ethniques, géographiques ou religieux.
Le terme « francophonie » n'a pas été forgé par un linguiste mais par un géographe, Onésime Reclus. Cette explication suffit-elle à justifier ce néologisme hybride, moitié germanique et moitié grec, pour désigner l'usage d'une langue latine ? Reclus est le premier à l'employer à la fin du XIXe siècle, et dans l'acception que nous en avons encore aujourd'hui. C'est à cette époque que le français part à la conquête de la France. En tant que langue officielle, d'un point de vue administratif, économique et symbolique - réserve faite de l'Église catholique, fidèle au latin -, la partie était gagnée depuis la Renaissance après les ordonnances de Moulins (1490), de Lyon (1510) et surtout de Villers-Cotterêts (1539, cf. p. 90). Lentement et sûrement, un nombre croissant de locuteurs abandonnaient leur parler maternel à son profit.