La Vierge, le chancelier et la montagne
La Vierge du chancelier Rolin est novatrice en histoire de l'art, notamment par le réalisme de la représentation. Cette peinture est aussi pionnière dans l'expression d'une sensibilité religieuse. On y voit un simple laïc en relation avec la Vierge et l'Enfant Jésus qui le bénit. Certes, le chancelier est à genoux, en prière, mais, à la différence de tableaux antérieurs, sa taille n'est pas inférieure à celle des personnages sacrés ; il est vêtu d'une somptueuse robe comme la Vierge et apparaît dans une relative égalité avec elle. Ici, nul besoin des saints ou des prêtres pour être en contact direct avec le Christ et sa mère. Rien de surprenant, puisque Jan Van Eyck, également au service de Philippe le Bon, est un adepte de la « devotio moderna ». Ce mouvement spirituel, né à la fin du XIVe siècle, sur les terres du duc de Bourgogne, ne veut pas séparer vie active et contemplation ; il affirme la possibilité d'un rapport personnel et affectif avec le Christ, insistant sur la dimension humaine de celui-ci. Ce tableau est donc la préfiguration de l'humanisme chrétien du premier XVIe siècle.
1 La loggia Derrière la scène principale, à travers trois arcades qui renvoient à la Trinité, on distingue trois arrière-plans qui ont tout autant de portée symbolique que la scène principale : d'abord la loggia, jardin clos qui symbolise aussi la Vierge. On y reconnaît deux oiseaux, la pie, symbole de la mort, et le paon, symbole de la vie. On remarque aussi deux petits personnages qui, pour certains commentateurs, représentent le peintre et son frère Hubert. Ces deux personnages regardent l'extérieur et non l'intérieur, ce qui révèle bien l'importance de ce paysage pour l'interprétation générale de l'oeuvre.