Les grandes oreilles du monarque
En pratiquant les écoutes téléphoniques a un niveau jusqu'alors inconnu sous la République, François Mitterrand a renoué avec le système d'espionnage généralisé instauré par Louis XIV à Versailles. Pour Emmanuel Le Roy Ladurie, qui prépare un ouvrage sur Saint-Simon, telle est peut-être la rançon de la monarchisation de notre système politique.
La France - truisme - tut longtemps une monarchie plus ou moins absolue. N'ergotons pas sur le terme d'absolutisme à propos duquel des flots d'encre ont déjà coulé. Disons que monarchie voulait dire, bien sûr, gouvernement d'un seul (en principe...), mais également système héréditaire au profit d'une certaine race royale (capétienne), le tout épicé par la loi salique, antiféministe sans doute, mais bien commode (à chaque décès royal, l'aîné du lignage prenait le relais). Ce régime s'appuyait sur des structures socio-politiques d'hérédité très répandues, notamment dans l'aristocratie.
L'absolutisme a donc développé sous Richelieu, mais surtout sous Louis XIV et au-delà, un système d'écoutes, de « grandes oreilles » : elles correspondaient aux aspects autoritaires de la royauté ; le « cabinet noir » déchiffrait les lettres, fussent-elles écrites en patois germanique - car il y avait de bons traducteurs, la Princesse Palatine en a su quelque chose.