Mourir pour Dreyfus
Pas moins de quarante duels entre 1898 et 1904 : dreyfusards et antidreyfusards ont défendu leurs idées au péril de leur vie. On a ainsi vu Paul Déroulède affronter au pistolet Georges Clemenceau, qui eut également affaire à Drumont, Henry se battre contre Picquart, Déroulède échanger quelques balles avec Jaurès...
Le 6 mars 1898, à dix heures et demie du matin, deux officiers supérieurs s'affrontent à l'épée dans la salle du manège de l'École militaire. L'événement n'a rien d'exceptionnel. Le duel est en effet particulièrement prisé par les militaires : d'après les statistiques judiciaires, ils en provoquent deux à trois cents par an, contre « seulement » une cinquantaine pour les civils - essentiellement des journalistes, des artistes et des écrivains. La plupart des combats se terminent sans grand dommage : un sur soixante-quinze seulement est mortel. « Quand la loi est impuissante, la justice désarmée, le droit inapplicable, alors le duel devient au moins compréhensible [1] », écrit Guy de Maupassant. C'est pourquoi, bien que le concile de 1869 ait excommunié les duellistes, les colonnes de tous les journaux européens se remplissent quotidiennement des récits de combats.