L'Histoire

Le démon du soupçon

D'où vient cette volonté obstinée de rechercher « le chef d'orchestre clandestin » qui ordonne le monde en secret ? Pourquoi ce goût pour des explications mystérieuses et ce recours aux boucs émissaires privilégiés - jésuites, francs-maçons, Juifs, etc. - pour donner aux événements une cohérence rassurante ? Ces questions fondamentales, nous les avons posées à Marcel Gauchet, un des meilleurs analystes actuels des mécanismes politiques. A ses yeux, il n'est pas dit que l'histoire apaisée que nous avons la chance de vivre doive durer : « Il est à craindre que le démon du soupçon ne se déchaîne de nouveau. »

Les Français, le livre et l'analphabétisme

Les sociétés contemporaines sont-elles moins alphabétisées qu'on ne le pense ? Et les sociétés anciennes l'étaient-elles davantage ? Qui lisait ? Qui possédait des livres ? Qu'est-ce qu'un éditeur au XVIIIe siècle ? La censure existait-elle ? Toutes ces questions, nous les avons posées à Roger Chartier, qui dirige, en collaboration, une « Histoire de l'édition française ».

Les peuples se souviennent toujours

A Varsovie, Moscou et Prague on emprisonne les historiens qui refusent d'écrire sous la dictée du pouvoir. A Buenos Aires, la junte militaire fait brûler des livres d'histoire*. Maître du présent, l'État totalitaire veut être aussi maître du passé. Il y eut des précédents: dès son avènement, Hitler fit réécrire les manuels scolaires allemands. Mais jamais l'État ne pourra imposer sa seule vision : il rencontrera toujours sur son chemin la mémoire collective insoumise. Et les historiens qui refusent le bon plaisir du prince.

A nos lecteurs

Il fut un temps où les historiens n’écrivaient que pour leurs confrères et leurs élèves. Où les non-spécialistes n’avaient accès qu’à une histoire anecdotique ou édifiante.