Portrait d'historien

La « mélancolie » de Raymond Klibansky

Qui est Raymond Klibansky? L'ultime survivant d'un monde englouti, un humaniste qui commence une phrase en anglais, la poursuit en grec et en latin, et l'achève en allemand. Cette Allemagne où s'est éveillée sa curiosité quasi obsessionnelle pour les idées. Cette Allemagne qu'il a dû fuir lorsqu 'elle est devenue nazie. Avec Erwin Panofsky et Fritz Saxl, il est l'auteur d'un ouvrage exceptionnel, Saturne et la Mélancolie. Exceptionnel aussi bien par ses recherches que par l'aventure qui préside à sa destinée. Pierre Assouline a rencontré Raymond Klibansky.

Pierre Nora, le chef d'orchestre

Pterre Nora n a signe qu un seul livre: Les Français d'Algérie (1961, Julliard). Et pourtant, il est l'un des historiens les plus connus de sa génération. Il le doit à ses qualités de médiateur, d'observateur et de négociateur hors de pair. Un chef d'orchestre en somme. L'œuvre de ce marginal malgré lui ? La revue Le Débat, dont le premier numéro fut publié il y a juste dix ans. Et les magistraux Lieux de mémoire, si révélateurs de son mode de pensée.

Marcel Gauchet, le franc- tireur des hautes études

La célèbre École des hautes études en sciences sociales vient de consacrer une personnalité non conformiste: elle a élu Marcel Gauchet directeur d'études. Sans agrégation, sans doctorat, r homme a fait irruption en 1980 dans le monde des idées en s'en prenant aux thèses de Michel Foucault. Les historiens préfèrent qu'on le dise philosophe. Et les philosophes le tiennent volontiers pour un historien dévoyé... Le principal intéressé s'en amuse. Têtu, il continue de construire une œuvre qui embrasse tous les domaines des sciences humaines, de la religion au politique, en passant par la psychiatrie. Jean-Maurice de Montremy a rencontré cet intellectuel «bulldozer».

Daniel Cordier et l'énigme Jean Moulin

C'est à la suite d'un débat télévisé houleux que Daniel Cordier, marchand de tableaux de son état, dérogeant à la règle qu'il s'était imposée jusque-là, a décidé de plonger dans les archives pour que les Français sachent enfin qui était son ancien « patron », Jean Moulin. Les deux premiers volumes de cette biographie monumentale du héros de la Résistance viennent d'être publiés. Pierre Assouline a rencontré leur auteur, un chercheur vrai, animé d'une passion d'horloger*.

Le phénomène Amouroux

Huit volumes parus depuis 1911 - le neuvième tome en préparation doit clore la série -, près de cinq mille pages et un million huit cent mille exemplaires déjà vendus au total: le succès de La Grande Histoire des Français sous l'Occupation écrite par Henri Amouroux, éditée par Robert Laffont, en fait plus qu'une simple «saga» historique. L'Histoire s'est interrogée sur ce phénomène né autour d'un auteur à la méthode originale. Nous avons d'abord demandé à Philippe Burrin d'analyser le «cas» Amouroux et sa signification. Puis nous sommes allés voir Henri Amouroux qui nous a conhe les secrets d une indéniable réussite. Gageons que le débat ne sera pas clos pour autant. Nous le reprendrons lors des rencontres organisées par France Culture, L'Événement du Jeudi et L'Histoire à Montpellier, du 11 au 21 juillet prochain, sur l'année 1940 en France, autour du thème: «1939, cinquante ans après: pourquoi la guerre nous hante» (cf. p. 77).

Eugen Weber : révérend, capitaine, historien...

Eugen Weber voulait être militaire ou historien. Il fut les deux. Roumain d'origine, devenu Anglais puis Américain, l'aventurier un peu poète, l'homme de «La Fin des terroirs» et de «L'Action française» se lance dans l'histoire. Avec ce nomade, cet éternel baroudeur, les cloisons sautent. Le Tour de France le passionne autant que les fascismes ou la nostalgie de la France rurale.

La Révolution couronne François Furet

On imagine mal Ihostilité que François Furet a déclenchée dans les années soixante-dix, au temps de l'Union de la gauche, lorsqu'il a publié «La Révolution française». Soupçonné de connivence droitière et de sympathie excessive pour les Américains, l'ancien président de l'Ecole des hautes études en sciences sociales offrait aux zélotes le profil d'un social-traître. Avec le recul, il semble bien que François Furet ait anticipé l'évolution des idées en France. Voici son portrait réalisé par Jean-Maurice de Montremy.